On se lance, on prend le risque de faire une improvisation. Improviser c’est rejoindre le monde, s’y mêler.
Jalea Caliente s’approprie et réinvente la forme du karaoké dans le but de joindre les réflexions artistiques à la vie quotidienne, de dissoudre et de remettre en question la frontière entre l’artiste, l’œuvre d’art et le public. Il s’agit d’une prétexte pour se rencontrer et dialoguer, d’une proposition de karaoké portable conçue pour explorer les relations produites dans le contexte de la fête.
Jalea Caliente Karaoke voyage, se déplace dans différents endroits de la ville de Bogota et, pendant quelques heures, envahit l’espace avec sa scène portative. Jalea Caliente est un duo de chanteuses qui ouvre chaque événement karaoké qu’elles organisent et s’efforce de transmettre l’énergie nécessaire pour motiver le public à faire partie de la scène. Les membres du karaoké, Jalea (Gelée) et Caliente (Chaude), interprètent une sélection de chansons qu’elles aiment et qui appartiennent à un large répertoire de musique populaire. Daniela Romo, Rafaella Carrá, Astrid Hadad, Laurie Anderson, Las Ultrasónicas, Maria Daniela y su sonido Lasser, The Police, Jannette, Amanda Miguel, Madonna, Chavela Vargas, Bat for Lashes et 31 minutos sont quelques-unes de leurs influences. Jalea Caliente se réunit fréquemment et favorise les occasions de rencontre entre les personnes qui aiment également le karaoké et veulent chanter.
Le karaoké est devenu mon dispositif d’action et de travail. En 2009 j’étais à Riosucio Caldas en Colombie pour réaliser un projet de recherche sur le Carnaval du Diable. Un carnaval au cours duquel les habitants de la ville se déguisent et préparent, en familles et en groupes appelés cuadrillas, des chansons connues qu’ils chanteront pendant le défilé. La particularité de ces chansons est que, bien que leurs rythmes proviennent de chansons populaires, leurs paroles sont entièrement composées par les habitants du village sur la base d’un thème d’intérêt social ou politique.
L’expérience de ce carnaval m’a placée dans un contexte différent de celui de l’académie; c’est ainsi que j’en suis venue à réfléchir au pouvoir de la chanson populaire dans les espaces festifs et quotidiens. La musique populaire est facilement ancrée dans la mémoire des gens. La fête subvertit tous les ordres établis. Le carnaval est l’expression maximale de cette subversion de l’ordre et le karaoké avait le potentiel de transférer cette capacité à la vie de Bogota, la capitale colombienne.